Beaucoup d’entre nous ont des pierres isolées dans un coin du jardin, ou bien des pierres qui ont été sorties du sol après un passage à la grelinette pour créer une zone de culture, ou encore des pierres extraites lorsque l’on a creusé pour construire une mare ?
Ne nous en débarrassons pas et redonnons leur une deuxième vie en créant un aménagement idéal pour la petite faune qui vous rendra de nombreux services au jardin !
Que ce soit un petit tas de pierre qui prendra 5 minutes à réaliser jusqu’au réel muret en pierre sèche qui demande plus de temps et de technique, vous observerez rapidement une foule d’espèces d’animaux qui les coloniseront : insectes, gastéropodes, arachnides, oiseaux, mammifères, reptiles, amphibiens, tous (en fonction de la taille, la forme et l’exposition de pierrier) y trouveront un, ou plusieurs, intérêt non négligeable en vous rendant en échange de nombreux services au jardin !
Évidemment, plus le pierrier / muret en pierre est grand, plus il a des chances d’accueillir les espèces qu’on vous présentera ici :

L’avantage premier, pour la biodiversité, d’un tas de pierres, d’un muret en pierre sèche, est la présence d’interstices, d’anfractuosités entre les pierres :
En effet, par définition ,un muret en pierre sèche signifie que l’on n’a utilisé aucun mortier, ciment, argile, boue, pour lier les pierres entre elles. Elles sont simplement empilées les unes sur les autres (la règle d’or pour une réalisation traditionnelle et plus durable est qu’une pierre repose toujours sur deux pierres) et ainsi à chaque pierre posée il y a des orifices qui se créent de chaque côté.
Les insectes
Les insectes vont s’en servir pour y trouver refuge lors des intempéries : protection contre la pluie, contre les vents, la neige, le froid, les fortes chaleurs.
Ils vont également l’utiliser comme cachette contre les prédateurs, et certains même comme habitat ou lieu de reproduction, de ponte, et d’autres, pour manger les espèces qui utilisent ce lieu, comme dans tout écosystème en bonne santé :
S’inviteront alors certains carabes et staphylins qui se feront un plaisir de réguler les escargots et limaces qui auront été attirés par les dizaines d’espèces de lichen qui colonisent rapidement ces milieux. On y retrouvera des fourmis, punaises, papillons, perce-oreille, mais aussi des centipèdes, et cloportes, qui, on le rappelle, participent activement à la création de votre humus au jardin.
En y trouvant de nombreux insectes on ouvre la porte aux araignées, certaines tisseuses d’autres sauteuses, qui en feront un terrain de chasse idéale !
Les oiseaux
Araignées et insectes attirent à leur tour les oiseaux qui en feront un lieu de nourrissage propice!
Les rougequeues noirs et à front blanc se percheront bien à vue au sommet et alterneront des allers-retours pour prélever en vol des insectes volants qui y entrent, sortent ou profitent de l’effet coupe vent que procure ce mur.
Le rouge gorge s’y retrouvera aussi régulièrement et utilisera, pour sa part, différentes techniques de chasse (retrouvez ici l’article dédié)
Le troglodyte mignon scrutera le mur avec précision pour y déceler ces araignées elles-mêmes alors en chasse.
Ces trois oiseaux pourraient également nicher dans ce muret si les cavités entre les pierres s’avèrent suffisamment grandes, si une ou plusieurs se sont écroulées, ou si la végétation ou le contexte environnant permet de construire son nid contre ou à proximité !
C’est vrai aussi pour la magnifique Huppe Fasciée, qui avait sa place jadis dans nos vignobles où elles trouvaient quantité de gros insectes (courtilières, orthoptères,…) et des cavités dans ces murets en pierres sèches ou dans les arbres morts (l’intérêt des arbres morts au jardin) au sein des haies de bordures.
Évidemment très peu probable dans nos jardins, mais réaliste dans les milieux ouverts, les domaines viticoles, les murets de grandes tailles dans les domaines agricoles, les murets de soutènement dans les oliveraies, c’est la visite majestueuse du circaète Jean le Blanc que votre muret pourrait favoriser ! En effet, ce dernier est le rapace spécialiste des reptiles, qu’il chasse grâce à sa vue incroyablement efficace.
Les mammifères
Et si on poursuit le long de la chaîne alimentaire, les oiseaux ne sont pas les seuls à se régaler des insectes, le hérisson pourrait se régaler des carabes mangeurs de limaces et bien sur des limaces elles-mêmes, et pourquoi pas, bien que plus rarement, les reptiles rencontrés sur son chemin.
Mais le hérisson ne fait pas que venir s’y nourrir, vous pouvez le favoriser au jardin en faisant de votre muret en pierre un lieu d’hivernage propice ou de mise bas au printemps /été si les interstices entre les grosses pierres à la base du muret lui offre un espace suffisant (12/12cm) – (pour en savoir plus sur comment favoriser le hérisson au jardin)
Toujours chez les mammifères, la musaraigne affectionne particulièrement les pierriers ou muret en pierre avec son régime essentiellement insectivore !
Encore un micro-mammifère que l’on connaît trop peu et qui pourtant rend bien des services au jardinier qui tente de récolter fruits/légumes au potager.
Qui dit musaraigne, dit potentiellement ses prédateurs à son tour, la belette ou l’hermine pourra être attirée par votre muret en pierre, et sachez qu’une belette au jardin, c’est le meilleur allié que vous puissiez rêver pour lutter contre les rongeurs que vous ne désirez pas dans votre maison ou au potager.
Bien plus efficace que votre chat, la belette a la capacité de se glisser dans les trous des rongeurs pour les traquer sous terre et se régaler d’un adulte bien portant grâce aux racines de vos légumes ou de ses petits qui auraient vus le jour dans une des galeries souterraines que vous redouter dans vos cultures !
Enfin les chauves-souris pourront être observés le long de murets en pierre sèche assez grand, pour venir chasser à la tombée de la nuit les papillons de nuits et autres insectes volants qui y trouvent refuges.
Les reptiles
Les reptiles trouvent également de quoi se nourrir, dont le bien connu lézard des murailles que l’on observe souvent proche de nos habitations, mais aussi le lézard agile, le lézard vert, qui se régaleront d’insectes, d’araignées, l’orvet, qu’on connaît pour son régime incluant les limaces qui nous jouent des tours au potager ou encore la coronelle lisse, un serpent trop peu connu et totalement inoffensif qui viendra à son tour manger ces reptiles.
Ils rejoindront ces milieux, non seulement pour chasser, mais aussi et surtout pour leurs avantages de thermorégulation, étant ectothermes.
En effet, le mur en pierre ou le tas de pierre, va emmagasiner la chaleur au moindre rayon de soleil, pour la restituer une fois disparu.
Plus le tas de pierre va être important (plus le muret va être haut) plus le potentiel de chauffe est important. L’orientation joue aussi, évidemment, un rôle important : un muret orienté au sud sera plus propice pour un reptile cherchant à se chauffer en début de journée pour pouvoir partir en chasse ensuite, ou au début du printemps alors que les températures extérieures sont encore fraîches.
Alors qu’un muret orienté au nord lui sera plus apprécié pour la recherche de fraîcheur, d’humidité lors des journées très chaudes d’été ou comme zone de repos, d’hibernation pour certains amphibiens.
Les amphibiens
Rebondissons sur les amphibiens, car oui, grenouilles, crapauds, tritons, salamandre, coloniseront à leurs tours volontiers vos tas de pierres/muret en pierre ! Ils participeront à leur tour à la régulation des limaces au potager pour tout les jardiniers qui y sont confrontés à cette saison;)
D’autant plus s’ils se trouvent à proximité d’une mare, d’une zone humide où ils se retrouveront pour la période de reproduction (en ce moment-printemps). Une mare au milieu d’un désert biologique/gazon tondu, aura en effet bien moins de chance de se voir coloniser.
De plus, la partie nord d’un muret de soutènement par exemple, gardera l’humidité et la fraîcheur que ces amphibiens recherchent ne pouvant pas exposer leurs peaux nues pendant les fortes chaleurs. Et enfin un muret avec des interstices en sa base, permettra à ces amphibiens de venir y passer l’hiver en sécurité et en zone hors gel grâce à la capacité d’emmagasiner la chaleur du muret.
Création de micro-climats
Un muret en pierre, ou un pierrier d’une certaine taille, c’est donc la création de micro-climat particulier au sein du jardin qui attirera donc différentes espèces en fonction des saisons, de l’ensoleillement, de la chaleur et des besoins respectifs de la faune du jardin. Des avantages difficilement égalables par les autres aménagement du jardin.
Gardons en tête, dans la réalisation, que plus le tas est important, moins les variations de température seront grandes en son centre, ce qui en fait des lieux de choix pour une hibernation réussie, ou pour des lieux de reproduction moins risqués !
La création de micro-climat ne se fait pas seulement au cœur du muret mais également en périphérie, en effet dans le cas d’un muret en pierre sèche d’une bonne hauteur, c’est un effet coupe vent que l’on crée à proximité (Le vent sera perturbé dans sa course sur une distance allant jusqu’à 8 fois la hauteur du muret une fois l’avoir traversé.) Ce qui est particulièrement intéressant pour la création de zones potagères, avec toute la faune à proximité pour l’équilibre et la résilience du systèmes, ou pour la création de massifs fleuris, prairies, zone maigre, favorisant les butineurs avec une zone coupée du vent.
On observe d’ailleurs régulièrement des bourdons nicher dans les cavités ou au sol des pierriers /murets en pierre. De même pour l’abeille charpentière, d’autres abeilles sauvages et guêpes qui y trouvent des lieux de nidification idéaux.
Création de corridors écologiques
Enfin, les murets en pierre représentent des corridors écologiques remarquables en favorisant la circulation de la faune au jardin et donc l’interconnexion et l’inter-régulation entre les différents éléments du jardin.
Pour ce faire, le muret ne doit pas se retrouver isoler avec du gazon ras autour mais agir en continuité avec des espaces d’herbes hautes, des tas de bois, une haie, le potager, le verger etc..vous permettrez ainsi aux différentes espèces citées plus haut d’agir pour la régulation et l’équilibre de vos zones cultivées. L’emplacement des murets ne se fait alors plus au hasard mais est penser avec l’ensemble des éléments dans la réalisation du design de nos lieux.
Bilan
Ceci est un tour d’horizon non exhaustif qui nous montre pourtant déjà toute la diversité d’espèces qui utiliseront cette aménagement au jardin, les services eco-systémiques qui participent à plus d’équilibre et de résilience et qui a un caractère esthétique qui n’a rien à envier aux murs de parpaings stériles pour la vie que l’on voit s’accumuler dans les nouvelles constructions, et participant du même coup à conserver un savoir et une pratique réalisée depuis des centaines d’années.
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