Découvrons l’étonnante vie du Tamandua !


Une chance de croiser ce magnifique mammifère !

Et ce pour plusieurs raisons :

Et puis enfin car, les fourmiliers ne « courent pas les rues » (sans mauvais jeu de mot car le Tamandua semble être incapable de courir) les observer ne se fait pas tous les jours !

En Guyane, on observe bien plus de Tamandua écrasés sur la route que vivant dans leurs habitats….

Pas de compétition entre les fourmiliers !

Nous avons 3 fourmiliers en Guyane française, Le grand Tamanoir, le Tamandua et le Myrmidon.
Pour éviter la compétition, l’évolution leur a octroyé des caractéristiques morphologiques, des compétences et des utilisations des habitats différentes.
En effet, alors que le Fourmilier géant qui mesure près du double de la taille du Tamandua, est pénalisé et limité par son poids pour évoluer facilement dans les arbres, et reste cantonné essentiellement au sol (bien qu’il ai été observé grimpant parfois); le Tamandua passe lui plus de la moitié de son temps dans les arbres, alors que le tout petit Myrmidon est toujours observé dans les arbres.

Des équipements d’acrobate :

Ses pattes avant sont pourvues de 4 griffes acérées, et la 3ème est particulièrement longue. Elles lui servent à grimper aux arbres, la tête en haut ou en bas, mais aussi comme on le verra plus bas à chasser et à se protéger.

Les pattes arrière, elles, sont équipées de 5 orteils avec un allongement particulier pour favoriser également l’accroche sur les branches.

Que mange t-il ?

Et bien l’origine du mot « Tamandua » chez la population Tupi nous donne la réponse : chasseur de fourmis.

Il est spécialisé dans la chasse aux insectes sociaux.
Il va se tourner essentiellement vers des fourmis et les termites mais complétera également son régime avec des abeilles, guêpe, larves de coléoptères.

En effet, il ne prélève pas que les adultes mais aussi les œufs, larves, cocons, couvains, miel, cire d’abeille et d’autres substances que les nids peuvent contenir.

Restant ses proies de prédilection, le Tamandua visitera entre 50 et 80 nids de fourmis et termites par jour!
Étant équipé pour la vie arboricole, il se tourne volontiers vers les termitières arboricoles, qu’on confond régulièrement avec des paresseux !
On estime à 9000 fourmis/termites avalées par jour!

A titre de comparaison, le Grand Tamanoir est lui à 30 000 – 40 000/jour.
Étonnamment, le minuscule Myrmidon à côté prélèverait tout de même près de 8000 insectes par jour !

Une économie de ses ressources alimentaires :

Malgré ces chiffres, il a été observé que le Tamandua ne vient pas à bout des nids qu’il visite, au contraire !
Il ne passe en effet que quelques minutes seulement sur chaque nid, d’une part pour éviter les morsures et réactions de défense collectives des hôtes du nid, mais aussi (de fait ou volontairement) afin de ne pas épuiser la colonie.

Les études ont montré qu’il est capable de se souvenir du lieu et de la date de ses visites dans les nids, afin de pouvoir revenir une fois seulement que la colonie se sera à nouveau renforcée ! Et ainsi avoir toujours des stocks de nourriture à disposition.

A défaut d’insectes sociaux il a été observé mangeant des fruits.

Comment chasse t-il ?

Le Tamandua trouve sa nourriture en déambulant, soit dans les arbres soit au sol, et se laissant guider essentiellement par son odorat, grâce à ce museau particulièrement long et muni de très nombreux « capteurs » lui permettant de repérer ses proies bien mieux que sa piètre vision.

Une fois le nid trouvé, il utilise ses puissantes griffes pour mettre à jour une partie du nid, y enfoncer son museau, puis y insère sa longue langue pour prélever ses proies à un rythme de 150 allers/retours par minute !

Une langue bien particulière

Les insectes se retrouvent collés/piégés sur la langue grâce à des caractéristiques bien spéciales.

En effet, pour commencer, elle peut mesurer jusqu’à 40cm de long !
Lui permettant de pouvoir plonger profondément dans les galeries et de récupérer de nombreuses proies tout du long.

Puis, elle est pourvues de nombreux « pics » orientés vers l’arrière, (un peu à l’image des pics) qui permettent de mieux accrocher les proies sur son passage.

De plus, toujours comme le pic, l’accroche des proies est aussi favorisée par une sécrétion épaisse et collante qui maintient les proies sur la langue avant d’être ramenées à l’intérieur de la bouche puis écrasées sur le palais avant d’être avalées.



Et pour finir, la digestion semblerait paradoxalement facilitée par des petits cailloux et autres debris mineraux ou vegetaux qui se colleraient également à la langue pendant le nourrissage en finissant d’écraser le reste des proies dans l’estomac !

Nul besoin donc de dents pour cet animal !

La communication chez les Tamanduas

Comme de nombreux mammifères, la vie sociale des Tamanduas est rythmée et dictée par l’odorat, utilisé comme principal moyen de communication.

A l’aide d’une sécrétion très odorante produite au niveau de leurs glandes anales ils vont transmettre de nombreuses informations.

En marquant les arbres, les roches et autres éléments du paysage sur leurs passages, ils vont marquer leur présence et leur territoire (les délimitant), annoncer leur maturité/disponibilité sexuelle, donner des informations sur les caractéristiques individuelles pour se reconnaître.

Ces sécrétions sont probablement utilisées également en cas de présence de prédateurs (l’odeur pouvant être particulièrement nauséabonde) et bien d’autres choses encore qui nous échappent.

Une communication non audible donc, mais loin d’être inexistante !
Le pisteur écoute la forêt parler, pas uniquement par le son mais par l’odeur et par la vue via les traces de ses visiteurs !

Les tamanduas semblent ne pas beaucoup utiliser le son.
Excepté entre le petit et sa mère où la communication est bien plus audible !

Sur le dos de sa mère :

Tout comme le grand Tamanoir, le Tamandua porte son unique petit sur le dos pendant ses déplacements, et ce même dans l’eau !
Pendant cette phase, qui durera un an, le petit observe, apprends, pour être capable, par la suite, d’analyser seul son milieu, rechercher sa nourriture en autonomie, éviter les dangers ou se défendre, communiquer avec d’autres Tamandua etc.
Seule la mère s’occupe du jeune chez ces deux espèces.
Alors que chez le Myrmidon, le père s’acquitte tout autant des devoirs parentaux en participant au nourrissage et au soin du jeune, dans leur nid, haut dans les arbres.

Les menaces qui pèsent sur lui :

Depuis des milliers d’années, plusieurs grands prédateurs tentent de braver les griffes du tamandua en le chassant à l’affût, en le regardant du haut des arbres, en le pistant à l’odeur, en le surprenant par derrière : on parle de l’emblématique Harpie féroce (et autres grands aigles), du Puma, du Jaguar et même du petit Ocelot.

Des milliers d’années de cohabitation ont permis a cette espèce de trouver des stratagèmes pour s’en sortir et de continuer à exister malgré un rythme lent de reproduction (un seul petit par portée et 2 à 3 ans avant qu’une jeune femelle puissent à son tour se reproduire.)

Mais aujourd’hui ce fourmilier doit faire face à une modification très rapide de son habitat.
Trop rapide pour qu’il puisse s’adapter et déceler les nouveaux pièges sur son passage :

C’est ainsi qu’on retrouve aujourd’hui plus de Tamandua écrasés sur les routes que pendant nos sorties nature.

Les routes et pistes, toujours plus nombreuses, fractionnent leurs habitats, divisent les territoires et les milieux et les forcent donc à les traverser pour continuer à trouver de la nourriture, un partenaire, fuir un prédateur etc.

Mais, leur métabolisme et leur locomotion étant affectés par leur régime alimentaire, le Tamandua se retrouve trop lent pour éviter des voitures et sa mauvaise vision n’arrange pas les choses.

Les dangers ne s’arrêtent malheureusement pas là.

Ils ont été et continuent dans une moindre mesure d’être chassés pour leur cuir, qui est particulièrement résistant, certains leur enlèvent la vie uniquement pour récupérer le tendon de leur queue pour en faire de la corde particulièrement résistante. Et d’autres encore les chasse pour leur viande, ou juste pour le « sport »

Un autre argument de chasseurs et de croyances populaires revient régulièrement dans la littérature : ils les tueraient parce que les Tamanduas attaqueraient les chiens dans les village…
Après avoir lu cet article, difficile d’imaginer cet animal attaquer délibérément un chien sans être lui même dans une posture de défense.

Enfin, certain continuent de prélever des Tamanduas pour les condamner à une vie d’animaux « domestiques » au côté de différents perroquets sud-américains et autres animaux sauvages livrés au folklore…

Tamandua tetradactyla – Guyane française – Octobre 2022

Merci au talentueux Alain Mas qui apporte une aide technique en photographie !
Retrouvez son travail ici : https://www.instagram.com/alphamasphoto/

SOURCES / Pour en savoir plus :

  • Mammals of the Southern Hemisphère – Marshall Cavendish – 2011
  • Emmons, Louise H. (1990). Neotropical Rainforest Mammals: A Field Guide, The University of Chicago Press, Chicago and London.
  • Macdonald, David. (1984). The Encyclopedia of Mammals, Facts on File Publications, New York.
  • Nowak, Ronald M. and Paradiso, John L. (1983). Walker’s Mammals of the World Vol. 1 4th edition, The Johns Hopkins University Press, Baltimore and London.
  • MAMMALIAN SPECIES 43(875):64-74. Tamandua tetradactyla (Pilosa: Myrmecophagidae)VIRGINIA HAVSSEN. Department of Biology, Smith College, Northampton, MA 01063, USA ;
  • The Online Guide to the Animals of Trinidad and Tobago Behaviour. Tamandua tetradactyla (Southern Tamandua or Lesser Anteater) – Kirlon John – 2011
  • Anteaters on the edge: giant and lesser anteaters (Myrmecophaga tridactyla and Tamandua tetradactyla) at their geographic distributional limits in Paraguay – 2020 -Iheringia Série Zoologia
  • Note on the climbing abilities of giant anteaters – Robert J yong- 2003
  • First study on food habits of anteaters, Myrmecophaga tridactyla and Tamandua tetradactyla, at the southern limit of their distribution. Jorge Alberto Gallo, Agustín Manuel Abba, Luciana Elizalde, Dante Di Nucci,
  • Tatiana Agustina Ríos and María Cecilia Ezquiaga. Mammalia-2016-0117
  • Allen JA 1904 – The Tamandua Anteaters – Bulletin AMNH 20: p385-398.
  • Emmons LH 1999 – Mamíferos de los Bosques Húmedos de América Tropical – Editorial FAN, Santa
    Cruz.

Une réponse à « Découvrons l’étonnante vie du Tamandua ! »

  1. Merci pour ce reportage très intéressant qui m’a fait découvrir cet étrange animal inconnu jusqu’alors pour moi, jolies photos également.

    J’aime

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s

%d blogueurs aiment cette page :